Lettre ouverte au Ministre Jan Jambon et au Député Européen Guy Verhofstadt

10.05.2025

Objet: Les retraites du personnel ferroviaire et la rupture de contrat de l'État

 

Messieurs Jambon et Verhofstadt, 

Le jeudi 8 mai, j'ai suivi le programme "Rond de la Table", dans lequel le ministre Jambon a discuté avec l'avocat Walter Damen. Au cours de cette conversation, Maître Damen a défendu les intérêts de la magistrature et du personnel ferroviaire. Il a parlé de rupture de contrat. Et il avait raison.

En tant que cheminot, j'ai, avec des milliers de collègues, contracté un engagement avec l'État. En échange d'un travail acharné, une pension décente nous a été promise. Aujourd'hui, cet engagement est unilatéralement rompu. Les règles sont modifiées en cours de jeu. Ce n'est pas une politique, c'est une rupture de contrat. 

Nous ne devons pas oublier non plus : le Zilverfonds - soi-disant créé pour sécuriser nos retraites - est à sec. Rien de cette promesse n'a été tenu. Et de nouveau, c'est vers l'ouvrier que l'on se tourne pour combler les déficits. Permettez-moi de vous rappeler un document important, souvent oublié : Le décret royal du 28 décembre 2005, sous la direction du Premier ministre Verhofstadt. Il y a été décidé que 300 millions d'euros du fonds de pension de la SNCB serait transféré au gouvernement fédéral pour combler le trou du budget. Ce fonds de pension était sain, et destiné à garantir les retraites du personnel ferroviaire. Cet argent a été constitué par notre travail, pas par l'État. Dans ce décret, il a même été explicitement promis que les retraites du personnel ferroviaire resteraient intactes. La pension a été reconnue comme un salaire différé. Ce que nous vivons maintenant, ce n'est pas seulement une rupture de contrat, mais aussi une rupture de confiance. 

Et c'est précisément pourquoi tant de collègues manifestent aujourd'hui dans la rue. Pas par paresse. Pas pour des "avantages". Mais pour défendre un droit fondamental : faire confiance à votre gouvernement. Si un décret royal ne vaut plus qu'un morceau de papier que l'on jette avec l'eau du bain après usage, alors je me pose de sérieuses questions sur la sécurité juridique dans ce pays. 

Que représente alors un contrat entre les citoyens et leur gouvernement ? Que reste-t-il de la confiance démocratique ? Ne sommes-nous pas, en tant que travailleurs, plus que des vaches à lait qui sont traitées jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien - pour ensuite être conduites à l'abattoir ? Parce que c'est ainsi que cela se sent en ce moment. 

Et non, Monsieur Jambon, le débat ne porte pas sur "l'âge de la retraite de 55 ans". C'est de la polarisation. Chaque année, ce n'est qu'un petit nombre de collègues qui répondent à ces critères. Y revenir chaque fois, c'est inciter consciemment les gens les uns contre les autres. Nous, en tant que conducteurs de train, machinistes, personnel ferroviaire, ne nous sentons pas supérieurs aux autres. Mais nous demandons le respect pour notre travail, et la reconnaissance de la réalité : ceux qui effectuent un travail lourd, méritent une retraite saine - et ce, à un âge où il reste encore quelque chose à en faire.

Mais surtout : chacun a droit à un nombre égal d'années de retraite en bonne santé. Et c'est précisément pourquoi les personnes qui ont travaillé dans un métier lourd doivent pouvoir prendre leur retraite plus tôt. Elles ont également contribué à cette société, avec cette seule différence : elles l'ont fait sous une charge physique ou mentale plus lourde. Et elles devront malheureusement profiter de leur retraite dans une santé moins bonne et avec moins d'années de vie. 

Arrêtez de diviser, et commencez à rassembler.

Rétablissez la confiance. Respectez les promesses faites. Et prenez soin des engagements que les gens ont pris avec leur gouvernement.